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Issue
Med Sci (Paris)
Volume 40, Novembre 2024
Les Cahiers de Myologie
Page(s) 9 - 11
Section Actualité
DOI https://doi.org/10.1051/medsci/2024136
Published online 18 November 2024

© 2024 médecine/sciences – Inserm

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L’enquête suivante a été réalisée dans le cadre d’un mémoire de recherche pour la validation du diplôme d’État d’Infirmière en pratique avancée (IPA). L’objectif était d’évaluer la prise en charge de l’insuffisance respiratoire du patient atteint d’une maladie neuromusculaire (MNM) en milieu ordinaire, c’est-à-dire vivant à son domicile, et d’étudier la plus-value de l’IPA, nouvel acteur de santé en France.

Introduction

Les maladies neuromusculaires sont des pathologies souvent incurables, progressives pouvant aller jusqu’à la perte partielle ou totale de l’autonomie. Elles demandent un suivi tout au long de la vie, notamment des fonctions cardio-respiratoires. L’altération de ces fonctions a un impact significatif sur la morbi-mortalité des patients. La décompensation respiratoire est l’une des principales causes de décès du patient atteint de maladie neuromusculaire [1]. Le parcours de santé est complexe et demande une prise en charge pluriprofessionnelle et coordonnée, surtout en milieu ordinaire. Le maintien à domicile de ces patients fait écho à la stratégie nationale de santé de 2018-2022 qui, dans une dynamique d’inclusion, a œuvré au maintien à domicile des personnes handicapées et au développement des soins de proximité [2]. Face à l’importance du suivi respiratoire dans les MNM, il était intéressant d’étudier l’état de ce suivi partagé entre la médecine de ville et les consultations pluridisciplinaires neuromusculaires (CPNM). Et ce, d’autant plus que le dernier rapport de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) de 2021 montre une diminution de la démographie médicale qui met en tension le système d’offre et de demande et impacte l’accès aux soins et le suivi des patients [3].

L’insuffisance respiratoire dans les MNM

Dans les MNM, l’insuffisance respiratoire (IR) s’installe généralement de manière progressive et insidieuse, surtout quand la maladie évolue lentement, comme dans le cas de la dystrophie musculaire de Duchenne (DMD) ou de l’amyotrophie spinale (SMA). Elle est due à un dysfonctionnement des muscles respiratoires aboutissant progressivement à une insuffisance respiratoire chronique restrictive et/ou à une altération de la capacité de toux.

Un bilan respiratoire doit donc être fait régulièrement. Les modalités de suivi sont développées dans les Protocoles nationaux de diagnostic et de soins (PNDS) validés par la Haute autorité de santé (HAS) et catégorisés pour chaque MNM.

Du fait de l’hétérogénéité de ces pathologies et selon le stade d’évolution de l’IR, le suivi respiratoire peut comporter une évaluation clinique (dyspnée, hypercapnie, perte de poids, etc.), une évaluation de la toux (débit expiratoire de pointe à la toux, etc.), des épreuves fonctionnelles respiratoires (pressions inspiratoire et expiratoire maximales, etc.), une gazométrie et des examens du sommeil (PaO2, PaCO2, oxymétrie nocturne, capnographie transcutanée, etc.) [4, 5].

Une aide mécanique peut être proposée afin de pallier le déficit des muscles respiratoires. On y retrouve les outils d’aide à la toux (l’insufflateur-exsufflateur mécanique, etc.), le relaxateur de pression utilisant les techniques d’hyper-insufflation, la ventilation non invasive qui est proposée classiquement lorsque la PaCO2 est supérieure à 45 mmHg ou lorsqu’une hypercapnie nocturne est détectée et associée, ou non, à des signes d’hypoventilation [6] et, enfin, la ventilation invasive par trachéotomie en dernier recours.

Le volet de la prévention et du dépistage a également toute son importance, quand on sait que 50 % des hospitalisations des patients NM sont causées par une complication respiratoire [7]. Pour limiter les infections, les préconisations standards se basent sur le respect de la vaccination (contre la grippe, le pneumocoque, la Covid-19) et des règles d’hygiène. Se rajoute la surveillance des signes d’hypoventilation et d’hypercapnie à travers l’éducation du patient, des aidants et des professionnels de santé. Le suivi de l’état nutritionnel est aussi important puisque l’obésité peut aggraver le trouble ventilatoire restrictif, les troubles respiratoires nocturnes et l’IR hypercapnique. A contrario, la dénutrition aggrave la perte musculaire, ce qui peut se répercuter sur la ventilation. Il faut aussi savoir identifier les troubles de la déglutition pouvant se compliquer de pneumopathies d’inhalation. En outre, est également nécessaire la prévention des risques de« iatrogénie médicamenteuse » due à l’automédication, par exemple, ou à l’utilisation de certains traitements tels que les sédatifs, les benzodiazépines ou les fluidifiants bronchiques [8]. Enfin, il faut s’assurer de la bonne observance des traitements.

Une enquête mettant en lumière le suivi de l’IR en milieu ordinaire

En février 2023, huit patients atteints de MNM (4 patients atteints de DMD et 4 de SMA), vivant en milieu ordinaire, ont participé à une enquête qualitative exploratoire et monocentrique via des entretiens semi-directifs. Le questionnaire portait sur le suivi global de la maladie neuromusculaire, l’évaluation de la prise en charge par le médecin généraliste et l’état du suivi de l’IR.

Les résultats montrent que l’intégralité des patients sont suivis par des spécialistes du CHU de proximité en lien, ou non, avec la CPNM. Ils jugent ce suivi régulier et satisfaisant.

Concernant le suivi en médecine de ville, le constat est plus mitigé. Un quart des patients est insatisfait et trois-quarts le jugent comme irrégulier. Ceci est essentiellement expliqué par une indisponibilité du généraliste, l’impossibilité pour celui-ci de se déplacer à domicile, ou à son manque de connaissances vis-à-vis de la MNM. Les conséquences sur la prise en charge de l’IR se traduisent par une banalisation de la prescription de traitements médicamenteux. Dans les cas d’infections respiratoires, pour un quart des patients, le médecin traitant prescrit des traitements, généralement des antibiotiques, sans consultation préalable. L’échange se fait par téléphone et l’ordonnance est envoyée par e-mail au patient. Et en cas d’infection, la moitié des patients s’oriente directement vers l’automédication. L’enquête met aussi en lumière le non-respect de l’intégralité des recommandations vaccinales de la part de la moitié des patients et l’inaccessibilité aux programmes d’éducation thérapeutique pour la totalité, ce qui montre un faible accès à l’éducation à la santé et à la prévention.

L’IPA, un nouveau professionnel de santé au service des patients neuromusculaires

En 2018, l’IPA – qui n’est pas un(e) infirmier(ère) de coordination – a fait son apparition dans le champ du suivi des pathologies chroniques, de la maladie mentale, de l’oncologie et de la néphrologie. S’appuyant sur une expertise et des compétences plus élargies, ce nouveau professionnel de santé a pour but d’améliorer le parcours de santé et l’accès aux soins des patients. Actuellement non inclus dans le suivi du patient français atteint de MNM, il a cependant déjà fait ses preuves outre-Atlantique, comme au Canada par exemple [9]. Il serait ainsi intéressant, pour le bénéfice du patient français, de l’inclure dans son parcours de santé.

Notre étude permet d’envisager les actions que l’IPA pourrait mettre en place en collaboration avec le médecin généraliste et l’ensemble des professionnels prenant en charge le patient. La plus-value pourra se faire en assurant un suivi clinique de proximité (consultation à domicile et/ou téléconsultation), en renforçant le lien ville-hôpital, en informant et formant les« pairs » sur la spécificité de la MNM, en aidant à la coordination du parcours de santé, en proposant une offre de soins centrée sur l’éducation à la santé (dépistage, prévention, éducation thérapeutique) et en accompagnant l’innovation thérapeutique.

Liens d’intérêt

L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.

Références

  1. Urtizberea JA, Boucharef W, Frischmann M. Maladies neuromusculaires : évolution des concepts médicoscientifiques et des pratiques de soins. Neuropsychiatrie de l’Enfance et de l’Adolescence 2008; 56 (2): 5157. [Google Scholar]
  2. Dal’Secco E. 2018-2022: quelle nouvelle stratégie nationale de santé? Handicap.fr. https://informations.handicap.fr/a-strategie-nationale-sante-10438.php (consulté le 28 novembre 2022). [Google Scholar]
  3. Anguis M, Bergeat M, Pisarik J, et al. Quelle démographie récente et à venir pour les professions médicales et pharmaceutiques? Les Dossiers de la DREES 2021. [Google Scholar]
  4. Boussaid G. Impact de la prise en charge respiratoire chez les patients atteints d’une maladie neuromusculaire. Université Paris Saclay (COmUE) 2016. Consulté le 27décembre 2022. [En ligne] [Google Scholar]
  5. Priou P, Trzepizur W, Meslier N, et al. Mise au point dans la prise en charge respiratoire des maladies neuromusculaires chroniques. Rev Pneumol Clin 2017; 73 (6): 316–322. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]
  6. Modalités pratiques de la ventilation non invasive en pression positive, au long cours, à domicile, dans les maladies neuromusculaires. Haute Autorité de Santé 2006. [En ligne] [Google Scholar]
  7. Lechtzin N, Wiener CM, Clawson L, et al. Hospitalization in amyotrophic lateral sclerosis: causes, costs, and outcomes. Neurology 2001; 56 (6): 753757. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]
  8. Prévention et maladies neuromusculaires. Savoirs et comprendre, AFM-Téléthon 2016. [En ligne] [Google Scholar]
  9. Chouinard MC, Leclerc N. Gestionnaire de cas: un modèle en clinique de maladies neuromusculaires. Perspective infirmière 2015; 12 (5): 51–56. [Google Scholar]

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