Mon premier contact avec médecine/sciences remonte à fin 1987, lorsqu’Axel Kahn (alors rédacteur en chef) me demanda d’écrire un éditorial pour la revue. Il s’agissait de faire le point sur ce qu’on appelait alors la Génétique inverse (depuis rebaptisée « clonage positionnel »), une approche très importante à cette époque « pré-Génome » et qui allait rencontrer de grands succès avec l’identification du gène impliqué dans la mucoviscidose et, plus tard, celui de la chorée de Huntington. Je connaissais Axel de réputation et, aussi, pour l’avoir croisé dans quelques réunions scientifiques. Très honoré de sa demande, je m’empressai d’écrire un éditorial de trois pages qui parut en mars 1988. Je n’imaginais pas que débutait ainsi une longue collaboration à la revue concrétisée en plus de trente ans par – si j’ai bien compté – pas moins de 178 « Chroniques génomiques ».

La première de ces chroniques, parue en janvier 1990 (Figure 1), était ornée d’un dessin d’Axel figurant la course d’un personnage le long d’un chromosome, un logo qui allait rester en place jusqu’à la fin de la décennie. Elle annonçait le thème central de cette série : le point sur les diverses facettes (scientifiques, techniques, politiques) des différents programmes Génome qui débutaient aux États-Unis, en Grande-Bretagne et (croyait-on) au Japon. Durant l’année 1990, plusieurs articles présentèrent différents aspects des projets en cours. Les encouragements d’Axel comptèrent beaucoup pour moi durant cette période, tout comme son soutien à un projet de « Tour du monde du Génome » qui allait prendre forme durant l’année suivante. Début 1991, je partais en effet pour une enquête itinérante à travers le monde sur les premières réalisations des programmes Génome, appuyée par la visite d’une petite centaine de laboratoires impliqués. Pendant toute l’année 1991, ce projet, solidement soutenu par Axel, fournissait la matière de plusieurs chroniques et, plus tard, d’un livre qui fut publié par les éditions Inserm¹. Au fil des années suivantes et selon l’actualité, ces chroniques allaient se poursuivre jusqu’à ce jour – car la Génomique demeure d’actualité !

Figure 1. La première « Chronique génomique », parue en janvier 1990.

Figure 2. Dédicace de « Et l’Homme dans tout ça » (2000).

Tout au long de ces années, j’ai suivi avec admiration l’itinéraire d’Axel. Son itinéraire scientifique et institutionnel bien sûr, mais aussi son investissement dans la communication vers le grand public, ses réflexions sur la science et plus largement l’éthique et le sens de la vie. Je n’oublie pas son engagement politique courageux, avec sa candidature à Paris en 2012, où il talonna François Fillon. Et encore, pour rappeler à quel point il était un homme complet, sa traversée de la France à pied en 2013.… Les dédicaces des livres que nous échangions au fil des années étaient une manière de garder le contact ; je reproduis (voir page précédente) celle de son premier ouvrage à visée philosophique « Et l’homme dans tout ça ? », paru en 2000. Dans son dernier courriel, fin 2020, Axel me parlait de son prochain livre « Et le Bien dans tout ça ? », et indiquait que ce serait sans doute le dernier… Sans le dire, il se savait déjà en sursis et ce titre, si proche à vingt ans de distance était, sans doute, une manière de boucler la boucle.

Axel va nous manquer. Son savoir encyclopédique, ses convictions affirmées, sa manière de penser et de parler clairement étaient précieuses en cette époque pleine de confusion et de fake news. Sa simplicité, sa disponibilité pour ses amis étaient sans faille. Comme il le disait lors de sa dernière interview, il espérait avoir été « un type bien ». Oui, Axel, tu étais un type bien, et nous tâcherons de poursuivre le mieux possible la voie que tu nous as tracée…

Bertrand

Chronique génomique (m/s n° 11, novembre 2011)

© 2021 médecine/sciences – Inserm

Liste des figures

	Figure 1. La première « Chronique génomique », parue en janvier 1990.
Dans le texte

	Figure 2. Dédicace de « Et l’Homme dans tout ça » (2000).
Dans le texte