Free Access
Issue
Med Sci (Paris)
Volume 35, Novembre 2019
Les Cahiers de Myologie
Page(s) 36 - 38
Section Fiche pratique
DOI https://doi.org/10.1051/medsci/2019239
Published online 20 December 2019

© 2019 médecine/sciences – Inserm

© Reyes-Fernandez P, et al.

Skelet Muscle 2019 May 27 ; 9 [1] : 15

La dermatomyosite est une myopathie inflammatoire idiopathique de l’enfant et de l’adulte, se caractérisant cliniquement par l’association de lésions cutanées caractéristiques, telles que des papules de Gottron (doigts, genoux, épaules) et des érythèmes violacés (visage et zone d’extensions), et d’une atteinte musculaire proximale et symétrique, progressive, chez des patients préalablement sains. Le diagnostic est confirmé au plan histologique par la présence de lésions myocytaires caractéristiques (atrophie périfasciculaire, microinfarctus et vacuoles de myosinolyse), d’une microangiopathie endomysiale et d’anomalies immunopathologiques incluant la ré-expression myocytaire du complexe majeur d’histocompatibilité (CMH) de classe 1 ubiquitaire avec renforcement périfasciculaire, l’absence d’expression myocytaire de CMH-2, et des signes d’activation du complément avec formation de complexe d’attaque membranaire au niveau des ­capillaires endomysiaux (Figure 1).

thumbnail Figure 1

Dermatomyosite : Biopsie musculaire. (A) Atrophie périfasciculaire et collagénolyse septale (H&E). Immunohistochimie (B-D) : (B) Expression myocytaire anormale de la NCAM au niveau des myofibres périfasciculaire (flèches) ; (C) Réexpression myocytaire diffuse du CMH1 (HLA-ABC) avec renforcement périfasciculaire ; (D) Immunomarquage de PECAM montrant une microangiopathie endomysiale avec perte focale en capillaires et béances luminales. A-D : Coupes congelées (7 μm) ; B-D : Immunopéroxydase, B : CD56/NCAM (NCL-CD56-1B6, 1/100), C : HLA-ABC (W6/32, 1/4 000), et D : CD31/PECAM (JC70A, 1/100).

La biopsie musculaire a été utilisée jusqu’à présent dans un but avant tout diagnostique. L’analyse diagnostique repose sur une évaluation qualitative des anomalies histologiques dépendant très largement de l’expérience du pathologiste. Dans le domaine de la myologie, les techniques de quantification des ­paramètres histologiques ont été développées pour des projets de recherche, sans envisager réellement d’application dans le contexte du soin courant. Plusieurs études ont pourtant montré que la quantification des lésions histologiques pouvait avoir une valeur pronostique prédictive applicable en pratique de routine [1, 2]. Aujourd’hui, le développement d’outils de numérisation des images histologiques accessibles dans la majorité des grands centres hospitaliers, l’existence de programmes d’analyse d’image faciles à utiliser et d’approches de type deep learning pour l’analyse automatisée ultra-rapide des images, ont constitué une évolution radicale dans le domaine de l’anatomie pathologique et permettent d’envisager une application des techniques de morphométrie automatisée à l’analyse de routine. L’analyse d’image automatisée est particulièrement adaptée à la quantification de processus élémentaires lésionnels comme l’atrophie ou la fibrose. Les progrès de l’intelligence artificielle dans le domaine de l’analyse d’images laissent entrevoir la possibilité d’un diagnostic qualitatif automatisé permettant un pré-tri des cas par l’ordinateur.

Quantification de l’atrophie périfasciculaire par la Macro IMRB

L’analyse d’images manuelle ou semi-automatisée a comme principal inconvénient de requérir un temps opérateur considérable et par ­conséquent ne peut s’envisager que pour l’analyse d’un champ restreint. Les résultats sont quant à eux toujours susceptibles d’être biaisés d’un expérimentateur à l’autre. À l’inverse, les méthodes automatisées permettent d’obtenir une homogénéité des résultats sur des champs importants en très peu de temps (en moyenne 180 secondes d’analyse avec la macro IMRB pour calculer la surface, le périmètre, le diamètre et la circularité d’environ 3 000 myocytes). Afin d’augmenter la diffusion du partage scientifique, notre macro a été développée pour être utilisée sous la plateforme en open access Fiji® [3].

La macro est entièrement automatisée et ne nécessite pas d’interventions durant l’analyse. L’image analysée va subir différentes étapes qui permettront de retirer le bruit de fond et les artéfacts présents et d’augmenter les contrastes pour faire ressortir les structures marquées (Figure 2). Cette analyse repose sur la détection des membranes myocytaires (double marquage dystrophine/spectrine) et l’identification des fibres de type II par le marquage de l’isoforme spécifiques de MyHC. Par défaut, les fibres non marquées sont identifiées comme des fibres de type I.

thumbnail Figure 2

Fonctionnement de l’analyse automatisée de sections de biopsies musculaires marquées par immunofluorescence à l’aide de notre macro développée sur la plateforme Fiji. (1) La première étape consiste à améliorer l’image en éliminant le bruit de fond et en augmentant le contraste. (2) La macro va ensuite combler les écarts entre les fibres et proposer à l’utilisateur une liste de paramètres d’exclusion modifiables pour améliorer la détection des fibres et diminuer le nombre d’artefacts. (3) Chaque membrane myocytaire est identifiée grâce au marquage dystrophine/spectrine. (4) Parmi les fibres détectées, celles positives pour MyHC sont segmentées et identifiées en tant que myofibres de type II. (5) Les myofibres de type I non marquées sont ensuite calculées par différence. Les paramètres morphologiques sont calculés et les résultats sont enregistrés sous la forme d’un fichier excel (.xls). La macro sauvegarde un fichier code couleur pour la distribution des fibres selon la surface et le petit diamètre des myofibres (d’après Reyes-Fernandez et al., 2019).

Une fois l’analyse terminée, la macro permet de produire plusieurs fichiers, un code couleur pour chaque section en fonction de la surface des fibres ou de leurs petits diamètres (du plus petit au plus grand), le codage est le suivant:

  • Surface des fibres musculaires: violet ≤ 1 000 μm2; bleu nuit 1 000-1 500 μm2 ; bleu cyan 1 501-2 000 μm2 ; bleu cyan foncé 2 001-2 500 μm2 ; vert 2 501-3 000 μm2 ; jaune 3 001-3 500 μm2 ; orange 3 501-4 000 μm2 ; et rouge > 4 000 μm2.

  • Petit diamètre: violet ≤10 μm ; bleu nuit 11-20 μm ; bleu cyan 21-30 μm ; bleu cyan foncé 31- 40 μm ; vert 41-50 μm ; jaune 51-60 μm ; orange 61-70 μm ; et rouge > 70 μm.

Le programme génère les résultats sous forme de tableaux excel (.xls) pour l’ensemble des fibres, les fibres de types II et les fibres de type I comprenant chacun (surface, périmètre, petit et grand diamètre, circularité) (Figure 3).

thumbnail Figure 3

Code couleur utilisé pour visualiser les modifications morphométriques du muscle. (A) Immunomarquage du sarcolemme (dystrophine/spectrine ; vert) et de l’isoforme des chaines lourdes de myosine spécifique des fibres de type II (MyHCII ; rouge). (B) Code couleur fonction de la surface de section transversale des fibres musculaires : violet ≤ 1 000 μm2 ; bleu nuit 1 000-1 500 μm2 ; bleu cyan 1 501-2 000 μm2 ; bleu cyan foncé 2 001-2 500 μm2 ; vert 2 501-3 000 μm2 ; jaune 3 001-3 500 μm2 ; orange 3 501-4 000 μm2 ; et rouge > 4 000 μm2. (C) Petit diamètre : violet ≤ 10 μm ; bleu nuit 11-20 μm ; bleu cyan 21-30 μm ; bleu cyan foncé 31-40 μm ; vert 41-50 μm ; jaune 51-60 μm ; orange 61-70 μm ; et rouge > 70 μm. (D) Fichier excel généré par la macro à la fin de l’analyse avec tous les paramètres analysés (d’après Reyes-Fernandez et al., 2019).

La dermatomyosite présente un caractère morphométrique caractéristique et propre à sa catégorie. En effet, elle présente une atrophie périfasciculaire pas toujours évidente sur les colorations standards, mais en revanche bien visible avec les codes couleurs sur les images artificielles générées par la macro. De manière analogue, la micro MuscleJ [4] permet une quantification du lit capillaire endomysial et donc de donner une évaluation quantitative de la microangiopathie. Les axes de recherche actuels visent à identifier les paramètres prédictifs de l’évolution de la maladie, en vue d’une stratification pronostique des patients à partir des données de l’histologie musculaire.

Liens d’intérêt

L’auteur déclare n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.

Références

  1. Desguerre I, Christov C, Mayer M, et al. image-analysis method for the quantification of fiber morphometry and fiber type population in human skeletal muscle. Skelet Muscle 2019; 9: 15. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]
  2. Aouizerate J, De Antonio M, Bader-Meunier B, et al. Muscle ischaemia associated with NXP2 autoantibodies: a severe subtype of juvenile dermatomyositis. Rheumatology (Oxford) 2018; 57: 873–9. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]
  3. Reyes-Fernandez PC, Periou B, Decrouy X, et al. Automated image-analysis method for the quantification of fiber morphometry and fiber type population in human skeletal muscle. Skelet Muscle 2019; 9: 15. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]
  4. Mayeuf-Louchart A, Hardy D, Thorel Q, et al. MuscleJ: a high-content analysis method to study skeletal muscle with a new Fiji tool. Skelet Muscle 2018; 8: 25. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]

Liste des figures

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Dermatomyosite : Biopsie musculaire. (A) Atrophie périfasciculaire et collagénolyse septale (H&E). Immunohistochimie (B-D) : (B) Expression myocytaire anormale de la NCAM au niveau des myofibres périfasciculaire (flèches) ; (C) Réexpression myocytaire diffuse du CMH1 (HLA-ABC) avec renforcement périfasciculaire ; (D) Immunomarquage de PECAM montrant une microangiopathie endomysiale avec perte focale en capillaires et béances luminales. A-D : Coupes congelées (7 μm) ; B-D : Immunopéroxydase, B : CD56/NCAM (NCL-CD56-1B6, 1/100), C : HLA-ABC (W6/32, 1/4 000), et D : CD31/PECAM (JC70A, 1/100).

Dans le texte
thumbnail Figure 2

Fonctionnement de l’analyse automatisée de sections de biopsies musculaires marquées par immunofluorescence à l’aide de notre macro développée sur la plateforme Fiji. (1) La première étape consiste à améliorer l’image en éliminant le bruit de fond et en augmentant le contraste. (2) La macro va ensuite combler les écarts entre les fibres et proposer à l’utilisateur une liste de paramètres d’exclusion modifiables pour améliorer la détection des fibres et diminuer le nombre d’artefacts. (3) Chaque membrane myocytaire est identifiée grâce au marquage dystrophine/spectrine. (4) Parmi les fibres détectées, celles positives pour MyHC sont segmentées et identifiées en tant que myofibres de type II. (5) Les myofibres de type I non marquées sont ensuite calculées par différence. Les paramètres morphologiques sont calculés et les résultats sont enregistrés sous la forme d’un fichier excel (.xls). La macro sauvegarde un fichier code couleur pour la distribution des fibres selon la surface et le petit diamètre des myofibres (d’après Reyes-Fernandez et al., 2019).

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Code couleur utilisé pour visualiser les modifications morphométriques du muscle. (A) Immunomarquage du sarcolemme (dystrophine/spectrine ; vert) et de l’isoforme des chaines lourdes de myosine spécifique des fibres de type II (MyHCII ; rouge). (B) Code couleur fonction de la surface de section transversale des fibres musculaires : violet ≤ 1 000 μm2 ; bleu nuit 1 000-1 500 μm2 ; bleu cyan 1 501-2 000 μm2 ; bleu cyan foncé 2 001-2 500 μm2 ; vert 2 501-3 000 μm2 ; jaune 3 001-3 500 μm2 ; orange 3 501-4 000 μm2 ; et rouge > 4 000 μm2. (C) Petit diamètre : violet ≤ 10 μm ; bleu nuit 11-20 μm ; bleu cyan 21-30 μm ; bleu cyan foncé 31-40 μm ; vert 41-50 μm ; jaune 51-60 μm ; orange 61-70 μm ; et rouge > 70 μm. (D) Fichier excel généré par la macro à la fin de l’analyse avec tous les paramètres analysés (d’après Reyes-Fernandez et al., 2019).

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