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Med Sci (Paris)
Volume 25, Number 5, Mai 2009
Arche de Noé immunologique
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Page(s) | 497 - 504 | |
Section | M/S revues : Arche de Noé Immunologique | |
DOI | https://doi.org/10.1051/medsci/2009255497 | |
Published online | 15 May 2009 |
Mécanismes de défense du nématode C. elegans
C. elegans defence mechanisms
Centre d’immunologie de Marseille-Luminy (CIML), Inserm U631, CNRS, UMR6102, Université de la Méditerranée, Campus Luminy, Case 906, 13288 Marseille Cedex 9, France
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pujol@ciml.univ-mrs.fr
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ziegler@ciml.univ-mrs.fr
Après s’être imposé comme organisme modèle dans plusieurs domaines de recherche en biologie comme le développement ou la neurobiologie, le nématode Caenorhabditis elegans est maintenant utilisé pour étudier les interactions hôte-pathogène. Les études de la réponse du nématode à l’infection par différents pathogènes bactériens et fongiques ont révélé que son système immunitaire inné utilise des voies de signalisation conservées au cours de l’évolution ; ces voies contrôlent l’expression des différentes molécules effectrices, dont certaines sont également conservées. Dans cette revue, nous exposerons les mécanismes généraux de défense du nématode pour ensuite nous concentrer sur la réponse immunitaire antifongique, objet de nos études actuelles.
Abstract
The nematode Caenorhabditis elegans has evolved as a powerful invertebrate model to study innate immunity to pathogens. C. elegans possesses inducible defence mechanisms to protect itself from pathogenic attack, mainly by the production of antimicrobial effector molecules. Its innate immune system is under the control of a surprisingly complex network of evolutionary conserved signalling pathways, which are activated depending on the pathogen, suggesting that C. elegans is able to mount a specific defence response to different pathogens. In this review we will introduce the worm’s immune system and discuss the different signalling pathways that regulate its response to bacterial pathogens which mainly infect C. elegans by an oral route and by invading its intestine, before focusing our attention on the resistance of C. elegans to a natural occurring fungal pathogen that infects the worm by invading its epidermis.
© 2009 médecine/sciences - Inserm / SRMS
C. elegans est un nématode non parasitaire vivant dans le sol, souvent trouvé sur des fruits en état de décomposition [1]. Il se nourrit de bactéries et est constamment exposé à de multiples pathogènes potentiels (Figure 1).
Figure 1. Schéma d’un nématode adulte et des différents modes d’infection. La plupart des pathogènes sont ingérés et établissent une infection dans la lumière intestinale. Certaines bactéries peuvent tuer le ver en libérant des toxines (*). La bactérie M. nematophilum et le champignon D. coniospora adhèrent à la cuticule et infectent C. elegans par son épiderme. La liste des pathogènes n’est pas exhaustive. |
Certains pathogènes, bactéries à Gram négatif, Gram positif ou levures (comme Cryptococcus neoformans) sont ingérés comme source de nourriture et provoquent une infection dans l’intestin. D’autres bactéries produisent des toxines, comme Bacillus thuringiensis ou Pseudomonas aeruginosa dans certaines conditions de culture. Microbacterium nematophilum adhère à la région anale et provoque un type de gonflement de l’épiderme [2]. Des champignons ont, eux, élaboré une variété remarquable de pièges pour nématodes, en forme de lasso constricteur (Drechslerella), d’hameçon (Harposporium) ou de simples quilles adhésives, comme Drechmeria coniospora (Figure 2). Un autre eucaryote de type microsporidie, identifié récemment, est un parasite intracellulaire naturel du nématode, Nematocida parisii [3].
Figure 2. Illustration de divers types d’attaque de champignon nématophage. Drechslerella anchonia à gauche (Pr. G. Barron, University of Delph, Canada), Drechmeria coniospora au centre (Jürgen Berger, MPI for Developmental Biology, Tübingen, Germany), Harposporium anguillulae. Échelle : 10 µm. |
Comme c’est le cas pour tous les invertébrés, la défense contre les pathogènes de C. elegans dépend uniquement de son système immunitaire inné. Le ver possède trois principaux mécanismes de défense. (1) Le premier est un comportement de fuite. Alors que la plupart des bactéries, sources potentielles de nourriture, attirent le nématode, certaines bactéries pathogènes provoquent au contraire un comportement d’évitement. Cette réponse de fuite est déclenchée par les neurones olfactifs et implique l’unique TLR (toll-like receptor) de C. elegans, TOL-1 [4] et une voie de signalisation en aval des récepteurs couplés aux protéines G (GPCR,G protein coupled receptor) [5]. (2) Des barrières physiques représentent le second mécanisme de défense. La cuticule, exosquelette du ver, formée de collagène et de chitine, est une première ligne de défense. Autre barrière, lors de l’ingestion de nourriture, le broyeur du pharynx empêche les bactéries ou levures de pénétrer intactes dans l’intestin (Figure 1), et des mutants dont le broyeur est défectueux sont plus sensibles aux infections bactériennes [6, 7]. (3) Enfin, C. elegans met en jeu des mécanismes inductibles de défense que nous discutons ci-dessous. Il faut noter que, contrairement aux insectes ou aux mammifères, C. elegans ne possède pas d’immunité cellulaire. Les cœlomocytes, seules cellules libres dans la cavité du corps, ne semblent pas capables de phagocyter des bactéries [8].
Reconnaissance des pathogènes
Les récepteurs dédiés à la reconnaissance des pathogènes sont appelés des PRR pour pattern recognition receptor. Les gènes codant pour des familles principales de PRR comme PGRP (peptidoglycan recognition proteins) ou GNBP (Gram-negative binding proteins) chez la drosophile ou NOD (nucleotide-binding oligomerization domain) et les protéines à domaine NACHT chez les mammifères [9] sont absents du génome de C. elegans. Le seul TLR présent chez le ver ne semble pas directement impliqué dans la résistance aux infections [4]. Chez les mammifères, certaines lectines de type C comme la Dectine-1 ont été impliquées dans la reconnaissance de β-glucan exprimé dans la paroi des champignons [9]. Il y a 278 gènes codant des lectines de type C chez le nématode, dont l’expression de certaines est modifiée lors d’infections par différentes bactéries [10].
La façon dont le nématode perçoit l’infection reste à découvrir, mais il est clair que selon la nature de l’infection, C. elegans développe une réaction de défense ciblée [11–13]. Une étude récente faite en parallèle chez le nématode et la souris propose une liaison directe des récepteurs scavenger (poubelle), CED-1/SCARF1 (C. elegans) et C03F11.3/CD36 (souris) aux β-glucanes de la paroi des levures Candida albicans et neoformans [14, 46] (→) Par ailleurs, un mutant du gène fshr-1 codant un GPCR à motif LRR apparaît plus sensible à l’infection par les bactéries à Gram positif et négatif, et exprime plus faiblement plusieurs gènes effecteurs de la réponse immunitaire. Les auteurs proposent l’hypothèse selon laquelle le récepteur FSHR-1 (un analogue du mammalian follicle stimulating hormone receptor) pourrait soit agir comme un récepteur hormonal aidant la réponse immunitaire, soit servir directement de PRR [15].
(→) Voir l’article de Daniel Poulain et al., p. 473 de ce numéro
La perception de l’infection se fera probablement via la reconnaissance directe des pathogènes ou de leurs facteurs de virulence, mais aussi des dommages cellulaires et du stress causés par les pathogènes [11, 16], selon la théorie du danger [17], comme cela a été montré chez les plantes, la drosophile [18] et les mammifères [19].
Voies de signalisation
Plusieurs cascades de signalisation sont activées en fonction du pathogène conduisant soit à la production de molécules effectrices, par exemple les lysozymes, qui pourront détruire les pathogènes, soit à d’autres réponses cellulaires qui protégeront l’organisme, telles que la production de ROS (reactive oxygen species) [20] ou la réponse UPR (unfolded protein response) [21].
Impliquées dans l’immunité des animaux et des plantes, les voies mettant en jeu les MAPK (mitogen-activated protein kinase) sont considérées comme les plus anciennes cascades de transduction du signal. Chez C. elegans, un crible génétique à partir de mutants hypersensibles à l’infection par P. aeruginosa a révélé un rôle pour la voie de la p38 MAPK dans la défense antimicrobienne [22]. Depuis, il a été montré que cette voie était impliquée dans la protection contre d’autres bactéries à Gram négatif et positif et semble être l’une des principales cascades de signalisation intervenant dans la réponse immunitaire innée [23]. Une autre voie MAPK, la voie ERK (extracellular signal-regulated kinase) est impliquée dans la résistance à l’infection par la bactérie à Gram positif M. nematophilum [24]. Enfin, la MAPK MEK-1 de la voie JNK (c-Jun N-terminal kinase) est nécessaire à l’activation complète de la p38, révélant une interaction entre les différentes voies MAPK [25].
Plusieurs études transcriptionnelles ont été réalisées comparant des vers infectés par diverses bactéries. La réponse du ver à une infection par S. marcescens a permis de mettre en évidence l’induction de plusieurs molécules effectrices telles que des lectines et certains lysozymes, la voie du TGF-β (transforming growth factor-β) étant nécessaire à cette induction [26]. La voie de l’insuline impliquant le récepteur DAF-2 et le facteur de transcription de type FOXO DAF-16 (un membre de la famille forkhead transcription factor) sont impliqués dans beaucoup de processus biologiques chez le nématode, notamment la longévité. Garsin et al. ont montré que les mutants daf-2 sont résistants à l’infection par E. faecalis, S. aureus et P. aeruginosa [27]. Mais des études récentes comparant des profils d’expression de gènes, sous le contrôle de daf-16 d’une part, et après infection par diverses bactéries d’autre part, révèlent peu de gènes communs, suggérant que daf-16 régulerait l’expression de gènes impliqués dans la défense constitutive du nématode contre les pathogènes [16, 23]. Enfin, la voie de la mort cellulaire programmée (PCD) semble protéger C. elegans contre l’infection par S. typhimurium [28].
Une absence remarquée : celle de NF-κB
Chez les insectes et les vertébrés, le facteur de transcription NF-κB représente le lien principal entre la réception et la transmission du signal d’infection et l’activation des effecteurs. Son absence chez le ver est étonnante mais ouvre une fenêtre d’investigation sur d’autres mécanismes de transcription potentiellement conservés chez les autres espèces. Une grande partie des effecteurs induits dans l’intestin en réponse à P. aeruginosa est sous le contrôle du facteur de transcription de type GATA ELT-2 [29]. Le groupe d’Aballay a montré qu’une élévation de température augmentait la résistance du ver en activant le facteur de transcription HSF-1 (heat shock factor) [30]. Récemment, le cofacteur de transcription BAR-1/β-caténine a été démontré comme étant nécessaire à la résistance contre S. aureus [31].
Modulation par le système nerveux
Deux articles récents fournissent la preuve d’une interaction chez C. elegans entre le système nerveux et le système immunitaire. Kawli et Tan ont démontré que la sécrétion des DCV (dense core vesicles) par les neurones régule négativement la réponse immunitaire intestinale contre P. aeruginosa et que ce mécanisme de contrôle neuronal est transmis par la voie de l’insuline dans l’intestin [32]. Styer et ses collègues ont montré par ailleurs que NPR-1, un GPCR apparenté au récepteur du neuropeptide Y chez les mammifères, régule négativement la réponse à P. aeruginosa, probablement en agissant en amont de la voie de p38 MAPK [33]. Mais cette étude est controversée, une autre équipe ayant attribué la réduction de la susceptibilité dans la souche mutante npr-1 à un phénomène mécanique. Les mutants npr-1 passent en effet plus de temps en groupe et seraient plus en contact avec les bactéries pathogènes [34].
La réponse antifongique chez C. elegans
La plupart des pathogènes bactériens décrits précédemment infectent le ver en envahissant la lumière de l’intestin dont la fonction naturelle est la digestion des bactéries. Il est de ce fait difficile de séparer digestion et réponse immunitaire de l’hôte. Notre équipe étudie surtout un autre type de pathogène qui attaque le ver par l’extérieur à travers sa cuticule.
Le champignon Drechmeria coniospora infecte le nématode à travers l’épiderme
Le champignon D. coniospora est un parasite nématophage strict. Il produit des spores en forme de petites quilles. La base renflée appelée bouton adhésif s’attache sur la cuticule du ver, notamment au niveau des interfaces entre l’organisme et le milieu environnant comme la bouche, la vulve et l’anus (Figure 2).
Des enzymes sécrétées par le champignon vont permettre de percer la cuticule et d’envoyer des hyphes qui vont croître dans l’épiderme et envahir tout le ver [35]. L’infection est rapide, le nématode peut être tué en 48 heures (Figure 3).
Figure 3. Infection de C. elegans par D. coniospora. Après 48 heures d’infection, les hyphes ont envahi le ver et commencent à sortir du nématode (A), le ver n’est plus qu’un cadavre poilu (B), les hyphes commencent à germer en conidia qui seront dispersées prêtes à établir une nouvelle infection. |
Réponse transcriptionelle de C. elegans à l’infection fongique
Une étude d’expression différentielle par puces à ADN a montré que, en réponse à une infection par D. coniospora, le nématode induit l’expression de plusieurs gènes codant une famille de peptides riches en glycine et tyrosine appelée NLP, pour neuropeptide-like protein et CNC pour caenacin. Des études d’expression à l’aide de gènes rapporteurs comme la GFP (green fluorescent protein) ou la DsRed ont montré que la majorité de ces gènes étaient induits après l’infection et exprimés dans l’épiderme du ver, site de l’attaque du champignon (Figure 4) [13, 36].
Figure 4. Expression du gène nlp-31. Image en microscopie confocale d’une jeune larve exprimant la GFP (green fluoresenct protein) dans l’épiderme sous le contrôle du promoteur du gène nlp-31. |
Amplification et sélection positive des gènes nlp et cnc
La majeure partie des gènes nlp et cnc induits après infection est positionnée dans le génome en deux groupes distincts, appelés groupe nlp-29 et cnc-2, sur le chromosome V. L’identification de groupes synténiques dans deux espèces de nématodes, C. briggsae et C. remanei, montre que lors de la divergence entre les espèces, il y avait probablement deux gènes dans le groupe nlp-29 et que l’un d’eux, nlp-27, a subi une expansion chez C. elegans, l’autre, nlp-34, chez C. briggsae. Des études d’adaptations évolutives basées sur le taux de remplacement de bases provoquant des mutations versus des remplacements silencieux, faites en collaboration avec H. Schulenberg (Kiel, Allemagne), suggèrent en effet une évolution adaptative positive du groupe nlp-29 [13] (Figure 5). La théorie contemporaine sur l’évolution des gènes de l’immunité innée propose que l’hôte et son pathogène partageant le même habitat fassent la « course » pour essayer d’échapper aux innovations de l’autre [37]. Une amplification par duplication en tandem et une diversification de gènes apparaissent comme les premières armes pour faire face aux stratégies échappatoires des pathogènes.
Figure 5. Arbre phylogénétique des gènes du locus nlp. Chez C. elegans (bleu), C. briggsae (vert) et C. remanei (rouge). C. remanei représente probablement la situation ancestrale avec deux gènes nlp-27 et nlp-34, alors qu’une amplification de nlp-27 s’est produite chez C. elegans et de nlp-34 chez C. briggsae [13]. |
Les peptides des groupes nlp-29 et cnc-2 ont des propriétés antimicrobiennes
Un des peptides du groupe nlp-29, NLP-31, a été synthétisé et son activité antifongique a été démontrée in vitro. De plus, lorsque des vers infectés par D. coniospora sont incubés avec ce peptide, celui-ci est capable d’arrêter la sporulation du champignon [36]. Enfin, des vers transgéniques surexprimant des peptides du groupe entier nlp-29 ou cnc-2 sont plus résistants à l’infection fongique [13, 38], ce qui confirme une activité antimicrobienne in vivo. Nous désignerons ces peptides sous le nom de peptides antimicrobiens (AMP).
Une blessure de l’épiderme induit l’expression des gènes AMP
Comme l’infection par le champignon implique l’ouverture d’une brèche dans la cuticule et l’épiderme du ver, nous avons testé la possibilité qu’une piqûre stérile puisse provoquer l’induction de l’expression des gènes AMP. En réponse à une simple piqûre avec une aiguille fine ou en utilisant un faisceau laser au niveau de l’épiderme, certains gènes AMP sont rapidement induits ; c’est le cas de la majorité des gènes du groupe nlp-29 et de certains gènes du groupe cnc-2. Par ailleurs, une expression constitutive forte de ces gènes est observée dans certains mutants présentant des défauts développementaux de l’épiderme. Cette expression pourrait protéger le nématode contre d’éventuelles attaques à travers un épiderme fragilisé [13, 39, 40]. Il en est certainement de même dans la peau des mammifères où une piqûre stérile provoque l’induction d’AMP [41].
La voie de la p38 MAPK contrôle l’expression des gènes AMP du groupe nlp-29 dans l’épiderme
Les molécules à domaine TIR (Toll-interleukin 1 receptor) étant connues pour leur implication dans l’immunité innée [42], nous avons testé le rôle des deux protéines contenant un tel domaine : le récepteur TLR TOL-1 et la molécule cytoplasmique TIR-1, homologue de SARM chez les mammifères. Si l’induction des gènes AMP est indépendante de TOL-1, TIR-1 régule uniquement le groupe de gènes nlp-29. Des vers transgéniques surexprimant le gène sek-1 (p38 MAPKK) spécifiquement dans l’épiderme sont capables de sauver les mutants sek-1 mais aussi tir-1 et nsy-1 (p38 MAPKKK). Cela montre que tir-1 agit en amont de la voie de la p38/MAPK, comme lors de l’infection par le pathogène intestinal P. aeruginosa [43], et que cette voie agit de façon intrinsèque à la cellule. L’induction de ces gènes par la piqûre est aussi régulée par la même voie [39].
Une kinase de type Tribbles est spécifiquement requise pour la réponse à l’infection
Une approche non biaisée par crible génétique a permis d’identifier plusieurs gènes responsables de l’induction des peptides en isolant des mutations récessives produites au hasard lors d’une mutagenèse par un agent chimique, mutations qui bloquent l’induction du peptide nlp-29 en réponse à l’infection (Figure 6). L’un de ces mutants, nipi-3, est particulièrement intéressant car il bloque la réponse à l’infection mais pas à la piqûre. Des études épistatiques ont montré que nipi-3 agissait en amont de la voie TIR-1/p38 dans l’épiderme. nipi-3 code une kinase homologue à Tribbles qui, chez les mammifères, agit aussi en amont de la voie de la p38 [44]. Ces données renforcent encore la réalité d’une conservation des molécules et des voies de signalisation intervenant chez le nématode et les mammifères et révèlent que les deux processus d’induction des peptides après piqûre et après infection sont contrôlés séparément au niveau génétique [39].
Figure 6. Illustration de l’induction des gènes nlp-29 après infection. Une souche transgénique, contenant un promoteur contrôlant la DsRed exprimé de façon constitutive dans l’épiderme et le promoteur inductible du gène nlp-29 contrôlant la GFP, est rouge en l’absence d’infection (gauche) et devient verte après 12 heures d’infection par D. coniospora (droite). |
La protéine kinase C fait le lien entre la signalisation des protéines G et la voie de la p38 MAPK
Lors du même crible génétique, l’identification de deux allèles du gène tpa-1 codant la protéine kinase C (PKCδ) a permis de révéler une cascade de signalisation, passant par la protéine Gα (GPA-12) et les phospholipases (EGL-8 et PLC-3), en amont de la PKCδ (TPA-1) dans la régulation de l’expression du gène nlp-29 en réponse à une piqûre ou une infection. Les GPCR qui réguleraient cette voie n’ont pas été identifiés, il y en a plus de 1 200 chez le ver. Les deux GPCR récemment impliqués dans l’infection bactérienne, FSHR-1 et NPR-1, sont des candidats à tester dans le futur.
Des études épistatiques suggèrent que l’activation par les protéines G agit en amont de la voie de la p38 et que NIPI-3 relaierait le signal spécifique de l’infection qui converge avec le signal de la piqûre sur la cascade PKC-TIR-1-p38 MAPK (Figure 7) [45]. Ces résultats sont cohérents avec l’idée que les GPCR représentent un mécanisme ancien et conservé de reconnaissance du stress cellulaire, en détectant par exemple les activités anormales de protéases, mécanisme probablement remodelé pour contribuer à la défense contre les infections [18].
Figure 7. Schéma de l’activation des différentes voies produisant l’expression des peptides antimicrobiens des groupe nlp et cnc. |
L’action paracrine du TGF-β contrôle l’expression des gènes AMP du groupe cnc-2 dans l’épiderme
La régulation du groupe des gènes cnc-2 apparaît tout autre. La sécrétion du ligand TGF-β par les neurones est en effet nécessaire à l’activation de la transcription des gènes du groupe cnc-2 dans l’épiderme en réponse à l’infection. Ce signal paracrine est lu par le récepteur hétérodimérique SMA-6/DAF-4 au niveau de l’épiderme et est transmis par la protéine SMAD SMA-3 (Figure 7) [38]. Une partie seulement de la voie de signalisation canonique du TGF-β étant utilisée, il sera intéressant de chercher à identifier les nouveaux partenaires permettant la transcription du groupe cnc-2 et d’analyser l’implication de ces nouveaux partenaires chez les mammifères.
Conclusion
C. elegans possède des mécanismes de défense inductibles, régulés par une surprenante diversité de voies de signalisation. L’implication des GPCR dans la reconnaissance directe des pathogènes reste à démontrer. Les données récentes sur l’implication du système nerveux dans la réponse immunitaire du nématode vont permettre de mieux comprendre la communication entre les différents tissus et de voir comment l’immunité est intégrée dans la physiologie de l’organisme.
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Liste des figures
Figure 1. Schéma d’un nématode adulte et des différents modes d’infection. La plupart des pathogènes sont ingérés et établissent une infection dans la lumière intestinale. Certaines bactéries peuvent tuer le ver en libérant des toxines (*). La bactérie M. nematophilum et le champignon D. coniospora adhèrent à la cuticule et infectent C. elegans par son épiderme. La liste des pathogènes n’est pas exhaustive. |
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Figure 2. Illustration de divers types d’attaque de champignon nématophage. Drechslerella anchonia à gauche (Pr. G. Barron, University of Delph, Canada), Drechmeria coniospora au centre (Jürgen Berger, MPI for Developmental Biology, Tübingen, Germany), Harposporium anguillulae. Échelle : 10 µm. |
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Figure 3. Infection de C. elegans par D. coniospora. Après 48 heures d’infection, les hyphes ont envahi le ver et commencent à sortir du nématode (A), le ver n’est plus qu’un cadavre poilu (B), les hyphes commencent à germer en conidia qui seront dispersées prêtes à établir une nouvelle infection. |
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Figure 4. Expression du gène nlp-31. Image en microscopie confocale d’une jeune larve exprimant la GFP (green fluoresenct protein) dans l’épiderme sous le contrôle du promoteur du gène nlp-31. |
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Figure 5. Arbre phylogénétique des gènes du locus nlp. Chez C. elegans (bleu), C. briggsae (vert) et C. remanei (rouge). C. remanei représente probablement la situation ancestrale avec deux gènes nlp-27 et nlp-34, alors qu’une amplification de nlp-27 s’est produite chez C. elegans et de nlp-34 chez C. briggsae [13]. |
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Figure 6. Illustration de l’induction des gènes nlp-29 après infection. Une souche transgénique, contenant un promoteur contrôlant la DsRed exprimé de façon constitutive dans l’épiderme et le promoteur inductible du gène nlp-29 contrôlant la GFP, est rouge en l’absence d’infection (gauche) et devient verte après 12 heures d’infection par D. coniospora (droite). |
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Figure 7. Schéma de l’activation des différentes voies produisant l’expression des peptides antimicrobiens des groupe nlp et cnc. |
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