Free Access
Issue
Med Sci (Paris)
Volume 24, Number 11, Novembre 2008
Page(s) 979 - 980
Section Forum
DOI https://doi.org/10.1051/medsci/20082411979
Published online 15 November 2008

© 2008 médecine/sciences - Inserm / SRMS

Le prix Nobel de médecine revient cette année aux Français Françoise Barré-Sinoussi et Luc Montagnier pour leur découverte du rétrovirus responsable du Sida en 1983 (VIH, virus de l’immunodéficience humaine, ou virus du sida), ainsi qu’à l’Allemand Harald zur Hausen pour sa découverte des papillomavirus humains, responsables du cancer du col de l’utérus. Vingt-cinq ans après l’isolement du virus du sida, ce prix reconnaît le travail des scientifiques français récompensés, et à travers eux celui de leurs collaborateurs cliniciens, virologues et chercheurs [1].

C’est en décembre 1982 que l’aventure de l’isolement d’un virus susceptible d’être la cause d’un nouveau syndrome mortel décrit pour la première fois en 1981 dans le Morbidity and Mortality Weekly Report [2] démarre à l’Institut Pasteur. Contactée par des cliniciens et des virologues, l’unité d’Oncologie virale de l’Institut Pasteur, dirigée par Luc Montagnier et spécialisée dans les relations rétroviruscancers, engage les recherches. Dès janvier 1983, les scientifiques travaillent sur la biopsie ganglionnaire d’un patient atteint de lymphadénopathie généralisée, ayant consulté en décembre 1982 à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière. Ils cultivent in vitro des lymphocytes purifiés de ce patient dans des conditions qui induisent leur prolifération (phytohémagglutinine,interleukine-2 et anticorps anti-interféron-α) [3] à la recherche d’un virus infectant ces cellules. Une activité transcriptase inverse fut détectée dans le surnageant des cultures, cette activité était dépendante de l’addition de cellules mononucléées du sang périphérique (CMN) de donneurs. En effet, le virus induisant la mort des cellules en culture, pour détecter l’activité transcriptase inverse, l’ajout de cellules était indispensable. De grandes particules virales de 90-130 nM bourgeonnant à la surface des membranes cellulaires furent visualisées par microscopie électronique. Les surnageants des cultures pouvaient infecter les CMN de donneurs non malades. Une protéine du virus, de 25 kDa, maintenant connue comme la protéine P24, différente des protéines similaires de HTLV-1 (human T cell leukemia/lymphoma virus type 1), fut mise en évidence, suggérant qu’il s’agissait d’un nouveau rétrovirus humain, mais sans activité de transformation des lymphocytes T ; à la différence de HTLV-1 et 2 ; ce virus fut alors dénommé LAV (lymphadenopathy associated virus) [1]. Rebaptisé HIV-1 (human immuno deficiency virus type 1) en 1985, ce virus appartient au genre des lentivirus de la famille des rétrovirus, groupe qui contient des virus associés à une virémie persistante chez les singes, les chats, les chevaux, les bovins et les chèvres.

Cette découverte en entraîna beaucoup d’autres dans les mois qui suvirent : mise au point d’un test de dépistage [4], identification du CD4 comme récepteur du virus [5], description de la séquence du virus [6], ouvrant la voie à la mise au point d’anti-rétroviraux.

Vingt-cinq ans après cette découverte, ONUSIDA estime à 33 millions (avec un intervalle plausible de 30 à 36) le nombre de personnes vivant avec le VIH à la fin de 2007, avec 2,5 millions nouvelles infections et 2 millions de décès en 2007 [7]. Si le vaccin se fait attendre, 22 anti-rétroviraux ont été mis au point et ont transformé le pronostic des patients qui y ont accès [8]. Les enjeux des années à venir restent la mise au point d’un vaccin [9, 10] et de méthodes innovantes et efficaces de prévention [10]. Sur le plan logistique, il est capital d’améliorer le dépistage au Nord comme au Sud et de développer les structures de prise en charge et de suivi au Sud tout en continuant à se battre pour obtenir des prix abordables en particulier pour les traitements de seconde et troisième lignes, la mesure des CD4 et de la charge virale.

Références

  1. Barré-Sinoussi F, Chermann JC, Rey F, Nugeyre MT, Chamaret S, Gruest Dauguet JC, Axler-Blin C, Vézinet-Brun F, Rouzioux C, Rozenbaum W, Montagnier L. Isolation of a T-lymphotropic retrovirus from a patient at risk for acquired immune deficiency syndrome (AIDS). Science 1983; 220 : 868–71. [Google Scholar]
  2. Gottlieb MS, Schroff R, Schanker HM, Saxon A. Pneumocystis pneumonia. MMWR Morb Mortal Wkly Rep 1981; 30 : 250–2. [Google Scholar]
  3. Broder S, Gallo RC.A pathogenic retrovirus (HTLV-III) linked to AIDS. N Engl J Med 1984; 311 : 1292–7. [Google Scholar]
  4. Brun-Vezinet F, Rouzioux C, Barre-Sinoussi F, Klatzmann D, Saimot AG, Rozenbaum W, Christol D, Gluckmann JC, Montagnier L, Chermann JC. Detection of IgG antibodies to lymphadenopathy-associated virus in patients with AIDS or lymphadenopathy syndrome. Lancet 1984; 323 : 1253–6. [Google Scholar]
  5. Klatzmann D, Barré-Sinoussi F, Nugeyre MT, Danquet C, Vilmer E, Griscelli C, Brun- Veziret F, Rouzioux C, Gluckman JC, Chermann JC, Montagnier L. Selective tropism of lymphadenopathy associated virus (LAV) for helperinducer T lymphocytes. Science 1984; 225 : 59–63. [Google Scholar]
  6. Alizon M, Sonigo P, Barré-Sinoussi F, Chermann JC, Tiollais P, Montagnier L, Wain- Hobson S. Molecular cloning of lymphadenopathy-associated virus. Nature 1984; 312 : 757–60. [Google Scholar]
  7. ONUSIDA. Rapport sur l’épidémie mondiale de sida 2008. Genève (CH) : Onusida, 2008 : 362 p. (http://www.unaids.org/fr/ KnowledgeCentre/HIVData/ GlobalReport/2008/2008_Global_report.asp). [Google Scholar]
  8. Mary-Krause M, Fichou J, Lanoy E, Lièvre L, Costagliola D, et le Groupe d’épidémiologie clinique de l’Anrs CO4 FHDH. L’infection à VIH après 10 ans de traitements antirétroviraux actifs dans la base de données hospitalière française sur l’infection à VIH (ANRS CO4 FHDH). BEH 2007; 46/47 : 394–7. [Google Scholar]
  9. Corbin A, Grigorov B, Roingeard P, et al. Une nouvelle vision de l’assemblage du VIH-1. Med Sci (Paris) 2008; 24 : 49–55. [Google Scholar]
  10. Darlix JL, Lévy Y. Le virus du Sida au milieu du gué vingt-cinq ans après. Med Sci (Paris) 2008; 24 : 4–6. [Google Scholar]

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