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Issue
Med Sci (Paris)
Volume 24, Number 6-7, Juin-Juillet 2008
Page(s) 665 - 666
Section Dernière Heure
DOI https://doi.org/10.1051/medsci/20082467665
Published online 15 June 2008

Le diabète de type 2 cétonurique

Il a été décrit il y a une vingtaine d’années, une forme atypique de diabète chez des individus originaires d’Afrique sub-saharienne. Cette forme est caractérisée par un début bruyant associant hyperglycémie sévère et cétose (production de corps cétoniques par le foie), voire acidocétose, nécessitant une insulinothérapie [14]. L’insulinothérapie peut ensuite être arrêtée car il existe une rémission qui peut durer plusieurs années (jusqu’à 12 ans) au cours de laquelle le patient reste très bien contrôlé sous régime seul ou avec des hypoglycémiants oraux. L’évolution est marquée par des rechutes cétosiques qui nécessitent de nouveau une insulinothérapie transitoire. Compte tenu de son début aigu, qui ressemble à celui d’un diabète de type 1 mais qui n’est pas associé aux marqueurs d’auto-immunité habituels, cette forme atypique de dia des patients prédisposés au diabète de type 2. Les facteurs classiques qui précipitent ou aggravent une hyperglycémie tels qu’une infection bactérienne, un traitement par les glucocorticoïdes, la consommation massive d’alcool, ont été exclus dans la majorité des cohortes décrivant cette forme atypique de diabète. Compte tenu de la situation géographique de l’hôpital Saint-Louis, nous sommes amenés à prendre en charge des patients diabétiques originaire d’Afrique sub-saharienne et nous étudions la physiopathologie de ce type de diabète.

L’herpès virus humain de type 8 (HHV-8)

HHV-8 est présent à l’état endémique en Afrique Sub-Saharienne où 30 % à 60 % des adultes ont des marqueurs de l’infection HHV-8 sans avoir eu de manifestations cliniques dans fection par le virus HHV-8 pourrait être un facteur participant au déficit transitoire de l’insulinosécrétion. Le VIH n’a pas été considéré car les premiers cas de diabète de type 2 cétonurique décrits en Afrique ont été rapportés à partir des années 1960, bien avant la survenue de l’infection par le VIH. Le virus de l’hépatite C qui a parfois été associé au diabète de type 2 n’a également pas été considéré car il est associé à une insulinorésistance et non pas à un déficit de l’insulinosécrétion [10, 11].

Les marqueurs d’infection par le HHV-8 dans le diabète de type 2 cétonurique

Afin de tester notre hypothèse, nous avons recherché d’une part la présence d’anticorps anti-HHV-8 chez des patients diabétiques ayant migré en France à l’âge adulte et d’autre part l’existence d’ADN viral dans le sang total chez des patients hospitalisés pour décompensation hyperglycémique, inaugurale ou non, du diabète.

Nous avons recherché la présence d’anticorps anti-HHV-8 chez des patients diabétiques d’origine d’Afrique subsaharienne hospitalisés pour ajustement thérapeutique, bilan du diabète ou éducation ; 187 patients consécutifs ont été vus pendant cette période (81 patients diabétiques de type 2 cétonurique et 106 patients ayant un diabète de type 2 classique). Ces patients ont été comparés à 90 africains normoglycémiques témoins, d’âge et de sexe comparables. Les anticorps anti-HHV-8 ont été retrouvés chez 87,7 % des patients diabétiques de type 2 cétonurique mais seulement 15 % des patients diabétiques de type 2 non cétonurique et 40 % des sujets témoins (Figure 1).

thumbnail Figure 1.

Prévalence des anticorps anti-HHV-8 chez les patients diabétiques de type 2 cétonuriques (KPD), les patients diabétiques de type 2 (T2D) et les sujets témoins

Nous avons pu mettre en évidence de l’ADN viral (signant un état actif d’infection) dans le sang total de patients hospitalisés pour épisode cétosique chez 6/13 diabétiques de type 2 cétonurique testés. En revanche, de l’ADN viral n’a été retrouvé chez aucun des 9 patients diabétiques de type 2 non cétonurique hospitalisés pour hyperglycémie.

HHV-8 peut infecter des cellules humaines β cultivées in vitro

Dans le cadre du programme de greffe d’îlots de l’Hôpital St-Louis, nous avons pu obtenir des îlots de Langerhans isolés à partir d’un donneur en état de mort cérébrale. Après 4 jours de culture en présence d’un surnageant contenant du HHV-8, nous avons observé au microscope confocal après immunomarquage, des cellules marquées pour l’insuline et marquées pour une protéine virale HHV-8. L’existence de ces cellules « doublement marquées » signe la capacité du virus à pénétrer les cellules β sécrétrices d’insuline.

Conclusion et perspectives

Cette étude [11] suggère donc que le phénotype diabète de type 2 cétonurique est associé à l’infection par le HHV- 8 sur 3 arguments :

  1. Près de 90 % des patients présentant le phénotype sont séropositifs.

  2. La moitié des individus qui ont été testés au moment d’une décompensation cétosique ont de l’ADN viral dans le sang.

  3. Le virus est capable d’infecter les cellules β pancréatiques in vitro.

La plus faible prévalence de la séropositivité chez les patients diabétiques de type 2 comparativement au diabète de type 2 cétonurique mais également par rapport aux sujets contrôles suggère que HHV-8 est le facteur qui ferait basculer le phénotype classique de diabète de type 2 vers le phénotype cétonurique (Figure 2). Autrement dit, des individus prédisposés au diabète de type 2 qui sont exposés au HHV-8 débuteraient la maladie sur un mode cétosique. Parmi les mécanismes invoqués, il est logique de s’orienter vers une atteinte de la cellule β par l’infection directe de la cellule par le virus. Cela reste à démontrer de même que les mécanismes de toxicité cellulaire utilisés par le virus.

thumbnail Figure 2.

Hypothèse étiopathogénique du diabète de type 2 cétonurique

Références

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Liste des figures

thumbnail Figure 1.

Prévalence des anticorps anti-HHV-8 chez les patients diabétiques de type 2 cétonuriques (KPD), les patients diabétiques de type 2 (T2D) et les sujets témoins

Dans le texte
thumbnail Figure 2.

Hypothèse étiopathogénique du diabète de type 2 cétonurique

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