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Med Sci (Paris)
Volume 24, Number 3, Mars 2008
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Page(s) | 237 - 238 | |
Section | Nouvelles | |
DOI | https://doi.org/10.1051/medsci/2008243237 | |
Published online | 15 March 2008 |
Un, deux, trois… mille génomes ?
One, two, three… a thousand genomes ?
Marseille-Nice Génopole, case 901, Parc Scientifique de Luminy, 13288 Marseille Cedex 9, France
Un nouveau consortium international annonce le projet de séquençage de l’ADN de mille personnes choisie parmi l’ensemble de la population humaine. Ce 1000 Genomes Project1 regroupe l’Institut Sanger, centre majeur des activités génomiques du Wellcome Trust au Royaume-Uni, la branche de Shenzen du Beijing Genomics Institute, grosse structure chinoise semi-privée qui a récemment annoncé le premier séquençage d’un individu d’ascendance Han, et le National Human Genome Research Institute, émanation des National Institutes of Health, aux États-unis.
Il s’agit bien là de séquençage, et non d’une simple analyse des Snips2 sur cet ensemble d’individus. Un tel projet est devenu possible grâce à l’arrivée effective des nouvelles techniques de séquençage : trois firmes (Roche avec le système 454, Illumina avec la machine Solexa, et Applera [ex-Applied Biosystems] avec le système SOLiD) proposent actuellement des appareils capables de lire plusieurs centaines de mégabases par jour à un tarif inférieur au cent par base3. Ces machines ne sont pas bon marché : l’investissement est de l’ordre d’un demi-million de dollars, et les coûts de fonctionnement sont en rapport ; il s’est néanmoins déjà vendu, par exemple, plus de deux cents appareils Solexa… L’objectif de ce projet est de produire un catalogue des variations (ponctuelles ou non) retrouvées dans le génome humain à une fréquence égale ou supérieure à 1 %, ce qui devrait accroître considérablement l’efficacité des études de génétique médicale et tout particulièrement des travaux d’association à l’échelle du génome entier (Whole Genome Association Studies).
C’est en quelque sorte une extension du projet HapMap [1]4, allant cette fois jusqu’au niveau de la « vraie » séquence au lieu de se limiter à un catalogue des Snips et de leurs associations en haplotypes. Concrètement, cela signifie que les chercheurs qui à l’avenir découvriront une association entre une région donnée du génome et la vulnérabilité à une maladie pourront directement accéder à un catalogue détaillé des variants existants dans cette zone et pourront alors tester chacun de ces variants dans des études fonctionnelles. En réalité, le plan ne va pas jusqu’à prévoir le séquençage intégral de mille individus ; il comporte plusieurs phases et combine la lecture in extenso d’une centaine de génomes avec une étude complète de tous les exons pour un millier d’individus. En tout état de cause, on peut penser que les objectifs précis évolueront au cours de la réalisation, en fonction des découvertes qui seront faites et aussi des futurs progrès des méthodes de séquençage5.
Les aspects éthiques ont été pris en compte - l’expérience malheureuse du projet Human Genome Diversity [2] qui avorta à la fin des années 1990 en raison d’une prise en compte insuffisante de ces problèmes n’a pas été oubliée. Les échantillons d’ADN proviendront des personnes déjà concernées par le projet HapMap et d’un ensemble additionnel d’individus, tous les donneurs restant anonymes et aucune information médicale n’étant répertoriée. La seule indication attachée aux échantillons sera celle de l’origine géographique des personnes (comme pour HapMap). Et naturellement - il s’agit bien d’une entreprise menée par les institutions publiques - l’ensemble des résultats sera librement disponibles sur les sites de l’European Bioinformatics Institute (EBI) et du National Center for Biotechnology Information (NCBI).
Les retombées attendues de ce programme (dont le coût est estimé à une quarantaine de millions de dollars) se situent au niveau de la compréhension des relations génotype/phénotype et de l’étiologie des maladies - notamment de celles, très nombreuses, pour lesquelles l’influence génétique s’exerce à travers les allèles de nombreux gènes et non d’un seul. Elle contribueront à l’avènement éventuel d’une médecine personnalisée fondée sur la connaissance des variants présents dans l’ADN de chacun de nous - ce « génome personnel » que j’ai déjà eu l’occasion d’évoquer [3, 4]. On ne peut que remarquer, en la regrettant, l’absence de la France dans ce consortium tout comme dans la plupart des travaux de génétique à grande échelle menés en ce moment…
Le calcul des coûts réels est un art en soi, il faut savoir si l’on parle de séquence « brute » ou de séquence vérifiée à 0,01 %, si l’on tient compte de l’amortissement, de la main d’œuvre… Le séquençage d’ADN n’est pas brusquement devenu gratuit, mais sans nul doute ces nouvelles méthodes abaissent considérablement son coût.
La technologie continue à évoluer rapidement, et une nouvelle (encore !) génération de machines fondée cette fois sur la lecture de molécules d’ADN isolées traversant des micropores est sur le point d’arriver sur le marché, la première étant très probablement celle proposée par l’entreprise Nord-américaine Helicos (à près de 1,5 millions de dollars l’unité)…
Références
- Montpetit A, Chagnon F. La carte d’haplotype du génome humain : une révolution en génétique des maladies à hérédité complexe. Med Sci (Paris) 2006; 22 : 1061–8. [Google Scholar]
- Cavalli-Sforza LL. The Human genome diversity project: past, present and future. Nat Rev Genet 2005; 6 : 333–40. [Google Scholar]
- Jordan B. Chroniques génomiques. Les révélations du « génome diploïde » de Craig Venter. Med Sci (Paris) 2007; 23 : 875–6. [Google Scholar]
- Jordan B. Chroniques génomiques. Génome personnel : gadget ou révolution ? Med Sci (Paris) 2008; 24 : 91–4. [Google Scholar]
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