Issue
Med Sci (Paris)
Volume 40, Number 8-9, Août-Septembre 2024
Nos jeunes pousses ont du talent !
Page(s) 683 - 687
Section Partenariat médecine/sciences - Écoles doctorales - Masters
DOI https://doi.org/10.1051/medsci/2024117
Published online 20 September 2024

© 2024 médecine/sciences – Inserm

L’actualité scientifique vue par les étudiants du Master 2 « Microbiologie Intégrative et Fondamentale » (MIF) en partenariat avec « l’Institut de Microbiologie, Bioénergies et Biotechnologie »(IM2B)

Responsable de l’Unité d’Enseignement

Laurent Aussel

Équipe pédagogique

Laurent Aussel - Professeur, Aix-Marseille Université - aussel@imm.cnrs.fr Amel Latifi - Professeur, Aix-Marseille Université - latifi@imm.cnrs.fr

Site web https://sciences.univ-amu.fr/fr/formation/masters/master-microbiologie

Série coordonnée par Claire Deligne et Sophie Sibéril.

 

Une étude a récemment révélé que les infections nosocomiales associées à la bactérie Gram à positif Staphylococcus aureus étaient de plus en plus fréquentes [1]. Certaines souches de cette bactérie ont progressivement développé une multirésistance aux antibiotiques, entraînant son classement dans la liste de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) des agents pathogènes prioritaires pour la recherche de nouveaux antimicrobiens [2]. De surcroît, un phénomène qualifié de persistance, connu pour ses répercussions sur les patients – notamment la reprise des infections suite aux échecs de traitements antibiotiques [3] – a été mis en évidence chez cette bactérie. Principalement étudiés chez les bactéries à Gram négatif, telles que Salmonella enterica, les « persisters » peuvent survivre à divers antibiotiques. À la différence de la résistance, la persistance n’est pas associée à l’apparition de mutations mais correspond à une sous-population bactérienne non croissante, capable de survivre à des doses létales de bactéricides [4]. Ce phénomène met donc en exergue l’urgence de mieux comprendre les causes de la formation de persisters et les mécanismes à l’origine de leur survie afin de développer des stratégies thérapeutiques efficaces. Cette nouvelle décrit l’évolution des différentes approches qui ont progressivement conduit à une meilleure compréhension de la persistance chez S. aureus.

Formation de persisters chez S. aureus : premières approches

Pour comprendre la formation de persisters chez S. aureus, l’une des premières pistes étudiées a été la corrélation entre persistance et entrée en phase stationnaire, caractérisée par un arrêt de croissance. Pour ce faire, des bactéries exprimant des rapporteurs fluorescents spécifiquement exprimés lors de la phase stationnaire ont été cultivées en présence d’un antibiotique, puis analysées par cytométrie en flux. Cela a permis d’identifier une sous-population exprimant précocement ces marqueurs et présentant une survie à l’antibiotique 100 à 1 000 fois plus élevée que le reste de la population bactérienne [5]. Par la suite, des approches fondées sur la technique de dilution de fluorescence ont permis de suivre la division de bactéries dans des lignées de macrophages infectés à l’échelle de la cellule unique. Pour ce faire, des bactéries exprimant une protéine fluorescente sous le contrôle d’un promoteur inductible ont été cultivées en présence puis en absence d’inducteur, stoppant la synthèse de novo de cette protéine. Les bactéries qui se divisent perdent alors la fluorescence au cours du temps tandis que celles qui ne se divisent plus conservent leur intensité de fluorescence. Ces expériences ont révélé la présence d’une sous-population bactérienne conservant une intensité de fluorescence constante au cours du temps, témoignant d’une absence de division [6]. Ainsi, ces résultats confirment que les persisters de S. aureus sont dans un état de non croissance. De plus, une fois remis en culture, la croissance de ces persisters a été restaurée et leur sensibilité aux antibiotiques retrouvée, démontrant la possibilité d’une réversion complète du phénotype de persistance [5, 6].

Pour comprendre les origines de cette survie, les chercheurs se sont interrogés sur la synthèse d’adénosine triphosphate (ATP) chez les persisters suite à leur arrêt de croissance. Une diminution de la concentration en ATP, molécule essentielle au fonctionnement de l’ensemble des processus biologiques, pourrait en effet influer sur l’efficacité des antibiotiques. De l’arséniate, une molécule qui inhibe la synthèse d’ATP, a été ajouté aux cultures bactériennes en phase exponentielle afin de mimer le faible niveau intracellulaire d’ATP rencontré en phase stationnaire. Lors de l’exposition de ces cultures aux antibiotiques, le nombre de persisters a augmenté d’un facteur supérieur à 300, suggérant un lien entre faible teneur en ATP et persistance [5]. À l’inverse, aucune fluctuation du niveau d’ATP n’a été observée chez des persisters prélevés à partir de macrophages infectés [4]. Dans ces mêmes conditions, des analyses transcriptomiques réalisées par RNA-seq1 et RT-qPCR2 ont révélé des modulations dans l’expression des gènes impliqués dans la traduction. Ainsi, l’expression de gènes codant des aminoacyl-ARNt synthétases est diminuée tandis que d’autres, comme infA, qui code un facteur d’initiation de la traduction, sont activés [4]. La présence d’une synthèse protéique dérégulée mais active démontre donc que les persisters ne sont pas strictement dormants, bien que leur croissance soit interrompue. L’ensemble de ces conclusions indique que la formation de persisters chez S. aureus dépend des conditions environnementales. De nouvelles approches de nouveaux modèles seront néanmoins indispensables pour identifier les déclencheurs de la persistance et leurs conséquences.

Influence de l’environnement sur la formation des persisters

L’étude de la persistance bactérienne dans des macrophages activés par des lipopolysaccharides (LPS) ou des interleukines a mis en évidence la présence d’un nombre plus élevé de persisters par rapport aux macrophages non activés. Cette observation démontre le lien étroit existant entre l’environnement de l’hôte et la formation de persisters. En effet, divers stress sont rencontrés par les bactéries lors de leur internalisation dans les macrophages, tels que le stress oxydant, la carence en fer ou en acides aminés (Figure 1AC) [6]. Bien que cela reflète l’importance d’étudier le phénomène de persistance dans des conditions d’infection, la diversité des stress intracellulaires complexifie l’identification de leurs effets respectifs. Afin de tester leur impact sur la persistance bactérienne, différents stress rencontrés dans le macrophage (stress oxydant, carence nutritive ou acidification du pH) ont été testés en milieu de culture. Cela a démontré que la production de formes actives de l’oxygène (FAO) par le macrophage lors de l’infection bactérienne induisait une forte tolérance des bactéries à la rifampicine, un antibiotique ciblant l’ARN polymérase bactérienne [6]. En parallèle, l’expression de gènes impliqués dans la synthèse d’acides aminés chez ces persisters a été suivie par RT-qPCR et leur niveau d’expression est resté inchangé, confirmant que leur carence ne causait pas de persistance. Étonnamment, cette même approche soutient que la réponse stringente, pourtant déclenchée par des carences nutritionnelles, est bien impliquée dans ce phénomène [4]. Cette réponse permet aux bactéries de s’adapter à des conditions défavorables en activant des cascades de régulations qui font intervenir une alarmone (molécule de signalisation), le (p)ppGpp. En conséquence, l’expression des gènes codant les régulateurs de cette réponse stringente (RelQ, RelP, CodY et Rsh) présente une activation transitoire chez ces persisters lors de leur internalisation dans les macrophages. De plus, ces expériences ont montré que la réponse stringente activait la réponse au stress membranaire et aux dommages à l’ADN (système SOS) [4]. En outre, une analyse par RNA-seq a révélé un enrichissement de l’expression des gènes codant des chaperons moléculaires impliqués dans le contrôle qualité des protéines, tels que DnaK et GroEL, connus pour être induits en réponse à divers stress [4]. La diversité de ces processus adaptatifs permet de mieux comprendre la capacité des persisters à survivre à un large éventail d’antibiotiques (Figure 1D).

thumbnail Figure 1.

Émergence de persisters au sein des macrophages lors d’infection par Staphylococcus aureus. A. Les bactéries non persistantes sont éliminées par les macrophages alors que les persisters survivent aux macrophages et aux traitements antibiotiques. B. Les formes actives de l’oxygène générées par les mitochondries et la NADPH oxydase au sein du phagolysosome permettent l’élimination des bactéries non persistantes, en plus des conditions hostiles de cet environnement. C. Les FAO générées par les mitochondries et la NADPH oxydase au sein du phagolysosome induisent la formation de persisters capables de survivre à cet environnement ainsi qu’à un traitement antibiotique. D. Les diverses voies métaboliques mobilisées au sein des persisters expliquent leur multi-tolérance aux antibiotiques. La réponse stringente stimule la réponse SOS et la réponse au stress membranaire, permettant respectivement le maintien de l’intégrité du génome et de l’intégrité membranaire. En lien avec un arrêt de la croissance, la synthèse protéique est diminuée mais reste toujours active, notamment via la forte production de chaperons moléculaires permettant également le maintien de la protéostasie (figure réalisée avec BioRender).

En complément, l’implication des FAO dans la formation de persisters a été étudiée chez la souris. Après infection de l’animal, des analyses par microscopie à immunofluorescence ont montré que les persisters étaient essentiellement présents dans les macrophages [6]. Par la suite, des dénombrements bactériens ont été réalisés dans la rate de souris sauvage ou Ncf1−/− (dont les macrophages sont dépourvus de la NADPH oxydase fonctionnelle produisant l’O2.-). Chez les souris Ncf1−/−, la rate renfermait plus de bactéries mais moins de persisters par rapport aux rates des souris sauvages [6]. Ces observations suggèrent que les FAO, qui possèdent des propriétés antibactériennes, jouent paradoxalement un rôle favorisant la formation de persisters chez S. aureus [6]. Enfin, l’absence de production de FAO causée par la délétion de Ncf1 a restitué la sensibilité aux antibiotiques de la sous population persistante dans la rate des souris mais n’a eu aucune incidence sur celle provenant du foie [6]. Cependant, il est connu que d’autres types de FAO, notamment issues des mitochondries, sont également produits. C’est pourquoi l’implication de l’ensemble des FAO dans la formation de persisters a été étudiée en administrant un agent antioxydant, neutralisant ces espèces toxiques (tempol) et a entraîné une restauration de la sensibilité à l’antibiotique des persisters dans cet organe [6].

Lors de sa vie intracellulaire, S. aureus mobilise divers mécanismes dont l’impact sur la persistance reste à approfondir. Le rôle des systèmes toxine-antitoxine pourrait être une piste à étudier plus en profondeur car ils sont peu caractérisés chez cette bactérie alors que leur importance dans la persistance a été mise en évidence chez des pathogènes à Gram négatif comme Salmonella enterica [7]. Un autre axe prometteur pour progresser dans la compréhension du phénomène de persistance serait de développer de nouvelles approches à hautdébit à l’échelle de la cellule unique [8]. Enfin, élucider la relation entre persistance et résistance aux antibiotiques d’un point de vue moléculaire et génomique semble essentiel pour l’élaboration de nouvelles solutions thérapeutiques. Récemment, des résultats prometteurs pour éradiquer des infections à S. aureus ont été obtenus grâce à des combinaisons d’antibiotiques agissant sur l’ensemble de la population bactérienne, dont les persisters, grâce à l’action ATP-indépendante de l’ADEP4, une molécule dérégulant la synthèse protéique par l’activation de la protéase ClpP [9]. Ces avancées sont donc encourageantes pour lutter contre la récurrence des infections nosocomiales occasionnées par ce pathogène.

Liens d’intérêt

Les auteurs déclarent n’avoir aucun lien d’intérêt concernant les données publiées dans cet article.


1

RNA sequencing

2

Reverse transcriptase quantitative polymerase chain reaction

Références

  1. Deniau N. Décès liés aux infections nosocomiales : Bilan 2008–2017. [Google Scholar]
  2. Campbell G. L’OMS veut de nouveaux antibiotiques. Pharmacovigilance. OMS 2017 ; 14 : 5. [Google Scholar]
  3. Moldoveanu A, L Rycroft JA, Helaine S, et al. Impact of Bacterial Persisters on Their Host. Curr Opin Microbiol 2021 ; 59 : 65–71. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]
  4. Peyrusson F, Varet H, Nguyen TK, et al. Intracellular Staphylococcus Aureus Persisters upon Antibiotic Exposure. Nat Commun 2020 ; 11 : 2200. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]
  5. Conlon BP, Rowe SE, Gandt AB, et al. Persister Formation in Staphylococcus Aureus Is Associated with ATP Depletion. Nat Microbiol 2016 ; 1 : 5. [CrossRef] [Google Scholar]
  6. Rowe SE, Wagner NJ, Li L, et al. Reactive Oxygen Species Induce Antibiotic Tolerance during Systemic Staphylococcus Aureus Infection. Nat Microbiol 2019 ; 5 : 282–90. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]
  7. Rycroft JA, Gollan B, Grabe GJ, et al. Activity of Acetyltransferase Toxins Involved in Salmonella Persister Formation during Macrophage Infection. Nat Commun 2018 ; 9 : 1993. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]
  8. Homberger C, Saliba AE, Vogel J. A MATQ-seq-Based Protocol for Single-Cell RNA-seq in Bacteria. Methods Mol Biol 2023 ; 2584 : 105–21 [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]
  9. Yee R, Yuan Y, Tarff A, et al. Eradication of Staphylococcus Aureus Biofilm Infection by Persister Drug Combination. Antibiotics 2022 ; 11 : 1278. [CrossRef] [PubMed] [Google Scholar]

Entretien avec Sophie Helaine

Sophie Helaine est professeure associée de microbiologie au sein de l’université de Harvard à Boston (USA). Après l’obtention d’un doctorat de microbiologie médicale à l’université René Descartes de Paris, elle s’est consacrée à l’étude de la formation des persisters chez Salmonella. Elle a progressivement constitué sa propre équipe de recherche, d’abord au sein de l’Imperial College de Londres, puis à l’université de Harvard où elle occupe son poste actuel.

Qu’estce qui vous a conduit à étudier les persisters?

Lors de mon post-doctorat à l’Imperial College de Londres, j’ai étudié l’interaction de Salmonella en tant que pathogène intracellulaire avec la cellule hôte. Je me destinais initialement à étudier le système de sécrétion de type 3 et comment ses effecteurs interfèrent avec les voies de signalisation de l’hôte. Pour suivre plus facilement la division des bactéries au sein des macrophages, j’ai construit un rapporteur fluorescent. J’ai alors observé que de nombreuses bactéries ne se divisaient pas et c’est ce qui m’a conduit à explorer ce phénomène. Par la suite, nous avons découvert qu’il s’agissait de persisters.

Les méthodes employées pour étudier les persisters sont de plus en plus sophistiquées. Sontelles transposables en santé humaine?

Oui, je pense qu’on peut utiliser des techniques vraiment élaborées sur des échantillons cliniques. Ce n’est évidemment pas le cas des rapporteurs fluorescents puisqu’on ne contrôle pas ce qui infecte les patients. En revanche, c’est possible pour des techniques transcriptomiques comme du RNA-seq ou en faisant du FISH dans les échantillons cliniques. Par exemple, les outils qu’on utilise pour étudier les persisters peuvent nous amener à trouver des biomarqueurs qui pourraient ensuite être recherchés dans les échantillons de patients. Donc, ce n’est qu’une partie de ces outils qui peut être transposée aux échantillons cliniques mais en tous cas, toutes les découvertes sont transposables en santé humaine.

Certaines études montrent que la formation de persisters est corrélée avec une exposition aux antibiotiques. Selon vous, estce réellement une cause ou bien un crible permettant de les discriminer?

Je pense que c’est les deux. Il y a certainement des antibiotiques qui n’induisent pas l’état de persistance mais permettent de le révéler. Les bactéries qui ne sont pas des persisters vont mourir et celles qui survivront à ces antibiotiques peuvent être des persisters. Par contre, certains antibiotiques, notamment les fluoroquinolones qui induisent des dommages à l’ADN, peuvent probablement être à la fois des révélateurs et des inducteurs contribuant à ce phénomène en ajoutant du stress supplémentaire pour les bactéries. Cependant, il n’y a pas besoin d’antibiotiques pour que les persisters soient formés pendant l’infection, le stress induit par ces conditions est suffisant.

Suite aux avancées récentes, quels sont les principaux questionnements en suspens dans ce domaine?

Certes, nous avons compris que les stress sont générateurs de persisters et que les voies de réponse aux stress sont importantes, mais il nous manque encore de nombreux relais. Il manque des déterminants moléculaires pour leur formation, leur survie ou la sortie de la persistance. Selon moi, il faut également approfondir les études sur les mécanismes moléculaires qui expliquent comment on passe de la persistance à la résistance. Par exemple, je ne pense pas qu’empêcher la formation de persisters soit vraiment thérapeutiquement réaliste puisque lors d’infections, les persisters sont formés très rapidement. Par contre, si on comprend comment les persisters deviennent ensuite résistants, on peut potentiellement intervenir thérapeutiquement.

Quelles techniques, encore non appliquées pour étudier ce phénomène, pourraient apporter des réponses complémentaires ou de nouvelles perspectives?

De nombreux groupes ont proposé par exemple de faire du single-cell RNA-Seq, ce qui est déjà mis en place pour l’étude de cellules eucaryotes. En revanche, au niveau bactérien, cette approche est plus difficile techniquement de par la faible quantité de matériel biologique disponible pour obtenir des lectures précises. Actuellement, ces techniques sont encore limitées pour la quantité d’ARN messager que l’on peut détecter au niveau de la bactérie et donc pour apporter des résultats concluants. L’autre piste à développer - et que nous sommes encore incapables de mettre en œuvre - concerne la protéomique sur une sous-population bactérienne, puisqu’il faut des quantités de matériel biologique encore plus importantes que pour la transcriptomique. Enfin, le développement de techniques hybrides entre la microscopie et la spectrométrie de masse permettrait de quantifier ce que les bactéries produisent, et pas uniquement ce qu’elles expriment, tout en analysant leur comportement. Cela permettrait donc de comparer les persisters avec les non-persisters.

Quelle est la place du hasard dans la carrière d’un chercheur et dans ses recherches?

Selon moi, il y a beaucoup de décisions, de rencontres ou d’observations qui sont dues à la sérendipité. En fait, je pense que le talent des gens, c’est peutêtre de forcer la chance et de reconnaître ce qui « sent bon ». Comme un chercheur d’or, dans un laboratoire, plus vous cherchez, plus vous avez de chances de trouver, mais il faut aussi être capable de reconnaître la pépite quand elle scintille en face de vous. Donc je dirais que la chance est un facteur important, mais il faut aussi savoir la provoquer et la reconnaître quand elle se présente.

Au cours de votre carrière, avezvous écarté avec regrets certaines thématiques que vous auriez aimé approfondir?

Oui. Pendant mon post-doc, j’étudiais initialement les effecteurs du système de sécrétion de type 3 et finalement, je ne l’ai jamais vraiment fait ! Comme mon travail porte toujours sur Salmonella, on retombe parfois sur ces effecteurs, mais je ne les étudie jamais véritablement et d’autres équipes le font très bien ! C’est quelque chose qui revient régulièrement et je ne sais pas si je vais un jour finir par le faire ou pas. En revanche, je n’éprouve pas de regrets. Certes, je les ai mis de côté mais au profit d’autres thématiques telles que les persisters que je trouvais plus excitantes.

Durant votre parcours, quelles sont les principales découvertes ou avancées dont vous êtes particulièrement fière?

Je pense que ce que nous avons montré sur la formation de persisters pendant l’infection causée par le stress de la cellule hôte est important parce que cela a permis de faire avancer ce champ de recherche et j’en suis fière. En tous cas, je suis contente de voir que ça a été montré par d’autres groupes et chez d’autres pathogènes parce que cela augmente son importance. Les découvertes qui me satisfont le plus, c’est lorsque nous arrivons à élucider un mécanisme moléculaire comme par exemple, la fonction enzymatique d’une toxine, autrement dit ce qu’elle fait et comment elle le fait, puisque cela représente pour moi un côté absolu. Comme l’a dit George Box « Tous les modèles sont faux, mais certains sont utiles. » À chaque moment, nous proposons des modèles dont nous savons qu’ils sont imparfaits mais c’est simplement le meilleur modèle que nous pouvons proposer avec les résultats que nous avons. Par contre, c’est vrai qu’en trouvant une modification enzymatique ou un mécanisme moléculaire, c’est assez difficile de s’imaginer que ce n’est pas vrai. Cela se rapproche un peu plus d’un modèle plus fin et je trouve cela assez satisfaisant.

Liste des figures

thumbnail Figure 1.

Émergence de persisters au sein des macrophages lors d’infection par Staphylococcus aureus. A. Les bactéries non persistantes sont éliminées par les macrophages alors que les persisters survivent aux macrophages et aux traitements antibiotiques. B. Les formes actives de l’oxygène générées par les mitochondries et la NADPH oxydase au sein du phagolysosome permettent l’élimination des bactéries non persistantes, en plus des conditions hostiles de cet environnement. C. Les FAO générées par les mitochondries et la NADPH oxydase au sein du phagolysosome induisent la formation de persisters capables de survivre à cet environnement ainsi qu’à un traitement antibiotique. D. Les diverses voies métaboliques mobilisées au sein des persisters expliquent leur multi-tolérance aux antibiotiques. La réponse stringente stimule la réponse SOS et la réponse au stress membranaire, permettant respectivement le maintien de l’intégrité du génome et de l’intégrité membranaire. En lien avec un arrêt de la croissance, la synthèse protéique est diminuée mais reste toujours active, notamment via la forte production de chaperons moléculaires permettant également le maintien de la protéostasie (figure réalisée avec BioRender).

Dans le texte

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