Histoire de la pomme à travers les âges (brèves ; 25/06/2012)

Histoire de la pomme à travers les âges

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En 2010, après celui du raisin et du concombre, le génome de la pomme était décrypté [1, 2]. Il s’agissait de la Golden delicious, choisie parmi les nombreux cultivars de Malus domestica. Cette pomme domestiquée est le résultat d’une longue histoire. Au début de l’ère tertiaire, lors du soulèvement de l’Himalaya, au Kasakhstan, sur les pentes du Tian Shan (les montagnes célestes), Malus sieversii, le pommier des origines se développe. Il sera le principal progéniteur de Malus domestica. Mais il était important de suivre l’évolution des pommiers au cours du temps, depuis que les marchands ont emmené ces fruits avec eux le long de la route de la soie dans toute l’Asie et en Europe. Plusieurs équipes françaises (dont celle de Tatiana Giraud, UMR8079 à Orsay), associées à d’autres groupes (belge, néerlandais, arménien, russe et chinois), viennent d’analyser de façon plus exhaustive l’histoire de la pomme domestiquée [3]. À l’aide de marqueurs microsatellites, les chercheurs ont étudié des échantillons de cinq espèces de pommiers (839 arbres depuis la Chine jusqu’à l’Espagne) : M. domestica, M. baccata (en Sibérie), M. orientalis, M. sierversii et M. sylvestris. Vingt-six microsatellites situés sur les 17 chromosomes (nombre haploïde du génome de la pomme) ont été choisis pour analyser les variations génétiques et les différences entre les cinq espèces de pommiers. Les résultats montrent clairement qu’en plus de M. sierversii, les pommiers sauvages (crabapple), particulièrement M. sylvestris, ont aussi été des contributeurs importants au cours des siècles. Il est possible que ces pommes aient été utilisées pour la fabrication du cidre avant que les Romains introduisent des pommes « douces » en Europe. À l’époque de Charlemagne, au IXe siècle et au siècle suivant, de nombreux pommiers ont été plantés pour produire cette boisson et les cultivars à cidre sont peut-être des hybridations entre M. sylvestris et des pommes douces. Les pommes amères domestiquées entrant dans la fabrication du cidre sont acides et très riches en tanins, comme les pommes sauvages européennes. Pourtant, elles ne comportent pas plus d’allèles de M. sylvestris que les pommes à couteau. Comme il existe des variétés avec des goûts très divers parmi les pommes sauvages d’Asie, on peut supposer que certaines ont été sélectionnées pour la production de cidre. Cette étude, très documentée, est intéressante car elle porte sur les arbres fruitiers, alors que jusqu’à présent, le suivi de l’évolution des plantes et de leur domestication avait surtout porté sur des espèces annuelles (comme le tournesol par exemple) dont le processus de domestication apparaît très différent, sans contribution de multiples espèces sauvages. Elle montre aussi qu’il est important d’identifier et de conserver les pommiers sauvages en les réimplantant en milieu agricole. Ils peuvent encore posséder des ressources génétiques insoupçonnées.

Simone Gilgenkrantz
médecine/sciences
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Références

  1. Gilgenkrantz S. Med Sci (Paris) 2011 ; 27 : 151.
  2. Velasco R, et al. Nat Genet 2010 ; 42 : 833-9.
  3. Cornille A, et al. PloS Genet 2012 : 8 : e100273.