Tout savoir sur le recyclage de l’hème (brèves ; 17/04/2013)

Tout savoir sur le recyclage de l’hème © Inserm
Jean-Christophe Lambry

Nous fabriquons 360 billions (le billion anglophone) de globules rouges (GR) par jour, et, chaque seconde, 5 millions de GR « âgés » sont éliminés par phagocytose dans les macrophages du système réticuloendothélial. Tout ceci a un coût, mais l’organisme est économe et recycle les composants du GR. Ce recyclage est la source principale des 25 mg de fer consommés quotidiennement pour la synthèse de l’hémoglobine, l’alimentation n’y contribuant que pour 1 à 2 %. L’hème est libéré de l’hémoglobine par catalyse dans les phagolysosomes des macrophages, puis dégradé dans le cytosol par l’hème oxygénase. Le fer libéré est soit stocké dans la ferritine, soit libéré de la cellule via la ferroportine (contrôlée par l’hepcidine, dont Sophie Vaulont nous raconte régulièrement les talents). Les maillons de cette chaîne de recyclage sont bien connus, sauf le transporteur qui véhicule l’hème du phagolysosome au cytosol. Une équipe américaine révèle dans Cell Metabolism qu’il s’agit de HRG-1 (haem responsive gene) [1]. Cette famille de transporteurs HRG avait été identifiée en 2008 chez C. elegans, un organisme auxotrophe, qui ne peut synthétiser l’hème et doit l’importer de l’extérieur [2]. L’expression de hrg1 est très élevée dans les cellules intestinales du ver et modulée par la concentration en hème de son alimentation. Outre ce rôle de transporteur intestinal chez C. elegans, HRG1 intervient aussi dans l’hématopoïèse chez le poisson zèbre, puisque son absence entraîne une anémie sévère. L’orthologue humain hHRG-1 avait été identifié par ces auteurs et localisé en 12q13, proche du gène DMT1, codant pour le principal transporteur de fer chez les mammifères. L’étude actuelle apporte des arguments fonctionnels : elle démontre que le processus d’érythophagocytose induit le recrutement de Hrg1 au niveau du phagolysosome du macrophage, et que l’expression de HRG1 est modulée par la concentration d’hème (elle augmente dans des situations d’anémie hémolytique aiguë et chronique chez la souris). La suppression de Hrg1 par ARN interférence induit une diminution des transcrits impliqués dans le recyclage du fer en aval, suggérant indirectement que HRG1 transporte le fer du phagolysosome dans le cytosol. Enfin, les auteurs tirent parti de l’étude d’un patient ayant une anémie microcytaire hypochrome réfractaire et hétérozygote composite pour une mutation du gène TMPRSS6 (qui réprime l’hepcidine) et un variant (P36L) d’HRG1. Contrairement à HRG1, HRG1-P36L ne restaure pas un phénotype normal chez des mutants du métabolisme de l’hème (levure et poisson zèbre). De plus, dans un modèle cellulaire permettant d’analyser les variations d’une hémoprotéine-étiquette dans des conditions d’érythrophagocytose, HRG1-P36L se localise correctement au phagolysosome, mais n’est pas capable d’induire l’activité de la protéine étiquette. Il n’est pas exclu que certains polymorphismes de HRG1 puissent expliquer certaines observations de surcharge en fer comme la sidérose de Bantou.

Laure Coulombel
médecine/sciences
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Références

  1. Rajagopal A, et al. Nature 2008 ; 453 : 1127-31.
  2. White C, et al. Cell Metabol 2013 ; 17 : 261-70.